Le débat public sur l’importation des déchets anime la société civile depuis la publication dans le Bulletin Officiel, le 3 août dernier, de deux décisions du ministère de l’Énergie, des Mines et de l’Environnement relatives à l’élaboration d’une liste des déchets non-toxiques importables et à l’application de certaines dispositions du décret N° 2.17.587 fixant les conditions et les modalités d’importation, d’exportation et de transit des déchets. Pour certaines ONG, c’est une véritable levée de boucliers qui n’est pas sans rappeler la tonitruante affaire des déchets importés en 2016 qui avait à l’époque déjà fait couler beaucoup d’encre. À entendre et à parcourir les commentaires des internautes et des ONG, la hantise palpable qui justifie ce nouveau regain de résistance est de voir se transformer le Royaume en poubelle pour les pays du Nord.
Le Maroc entre deux eaux
S’il existe plusieurs pays du Tiers-monde qui ont accepté de devenir les dépotoirs de pays riches pour une poignée de (millions) dollars, force est de constater que notre pays n’est pas dans ce cas de figure malgré les craintes légitimes des environnementalistes. « Les déchets constituent un marché mondial comme un autre. D’ailleurs, tous les pays importent et exportent des déchets. La différence, c’est qu’il y a des pays où cette activité se fait avec des retombées économiques et sociales réfléchies et d’autres où elle se fait sans aucune vision », explique Hassan Agouzoul, expert en transformation énergétique et en développement durable. Le spécialiste classe cependant le Maroc parmi les pays qui ne sont pas dans une situation « alarmante » mais qui gagneraient à construire une véritable stratégie dédiée à l’économie circulaire.
Un pilier potentiel de développement
À part les « pays poubelles », « il existe une catégorie de pays –dont le Maroc fait partie- qui ont des consommateurs de matières premières pour lesquels il y a parfois un besoin d’acheter de la matière première à l’international dans un cadre légal bien défini. Le bon modèle que nous devons cependant chercher à atteindre est celui où nous disposerons d’une réelle stratégie de filières industrielles de recyclage qui valorisent les déchets marocains et internationaux », souligne Hassan Agouzoul. « Dans les nouveaux modèles de développement mondiaux, les déchets ne sont plus considérés comme des ordures, mais comme des ressources », confie pour sa part Abderrahim Ksiri, président de l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre (AESVT) et coordinateur national de l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD). « La préparation du nouveau modèle de développement du Royaume est une opportunité extraordinaire pour faire de l’économie circulaire l’un des piliers de l’économie et un moteur de création d’emploi et protection de l’environnement », précise-t-il.
Propositions de la société civile
En réaction à la polémique qui a vu le jour au début du mois, le Département de l’Environnement avait tenu à préciser que l’importation des déchets est soumise à une série de normes et de conditions pour qu’ils ne nuisent pas à l’environnement avec l’importation. « Les déchets importés sont destinés à être valorisés et recyclés et non enfouis », ajoute le département, précisant qu’entre 2016 et 2019, « le Royaume a importé près de 1,6 million de tonnes de ces déchets qui constituent des matières premières pour l’énergie et l’industrie tels que le tissu, le plastique, le papier et les minéraux ». Ce à quoi, la société civile répond qu’il n’est pas uniquement question d’importation, mais du cadre légal régissant ces activités qui est devenu obsolète. « Nous avons travaillé depuis 8 ans sur ce dossier et nous avons analysé la loi 28.00 en proposant un changement du cadre légal. Nous ne pouvons plus continuer avec une lois sur la « gestion des déchets et leur élimination » alors qu’elle devrait désormais porter sur l’économie circulaire et sur la gestion et la valorisation de la ressource que représentent les déchets », résume le coordinateur de l’AMCDD.
Le Maroc entre deux eaux
S’il existe plusieurs pays du Tiers-monde qui ont accepté de devenir les dépotoirs de pays riches pour une poignée de (millions) dollars, force est de constater que notre pays n’est pas dans ce cas de figure malgré les craintes légitimes des environnementalistes. « Les déchets constituent un marché mondial comme un autre. D’ailleurs, tous les pays importent et exportent des déchets. La différence, c’est qu’il y a des pays où cette activité se fait avec des retombées économiques et sociales réfléchies et d’autres où elle se fait sans aucune vision », explique Hassan Agouzoul, expert en transformation énergétique et en développement durable. Le spécialiste classe cependant le Maroc parmi les pays qui ne sont pas dans une situation « alarmante » mais qui gagneraient à construire une véritable stratégie dédiée à l’économie circulaire.
Un pilier potentiel de développement
À part les « pays poubelles », « il existe une catégorie de pays –dont le Maroc fait partie- qui ont des consommateurs de matières premières pour lesquels il y a parfois un besoin d’acheter de la matière première à l’international dans un cadre légal bien défini. Le bon modèle que nous devons cependant chercher à atteindre est celui où nous disposerons d’une réelle stratégie de filières industrielles de recyclage qui valorisent les déchets marocains et internationaux », souligne Hassan Agouzoul. « Dans les nouveaux modèles de développement mondiaux, les déchets ne sont plus considérés comme des ordures, mais comme des ressources », confie pour sa part Abderrahim Ksiri, président de l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre (AESVT) et coordinateur national de l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD). « La préparation du nouveau modèle de développement du Royaume est une opportunité extraordinaire pour faire de l’économie circulaire l’un des piliers de l’économie et un moteur de création d’emploi et protection de l’environnement », précise-t-il.
Propositions de la société civile
En réaction à la polémique qui a vu le jour au début du mois, le Département de l’Environnement avait tenu à préciser que l’importation des déchets est soumise à une série de normes et de conditions pour qu’ils ne nuisent pas à l’environnement avec l’importation. « Les déchets importés sont destinés à être valorisés et recyclés et non enfouis », ajoute le département, précisant qu’entre 2016 et 2019, « le Royaume a importé près de 1,6 million de tonnes de ces déchets qui constituent des matières premières pour l’énergie et l’industrie tels que le tissu, le plastique, le papier et les minéraux ». Ce à quoi, la société civile répond qu’il n’est pas uniquement question d’importation, mais du cadre légal régissant ces activités qui est devenu obsolète. « Nous avons travaillé depuis 8 ans sur ce dossier et nous avons analysé la loi 28.00 en proposant un changement du cadre légal. Nous ne pouvons plus continuer avec une lois sur la « gestion des déchets et leur élimination » alors qu’elle devrait désormais porter sur l’économie circulaire et sur la gestion et la valorisation de la ressource que représentent les déchets », résume le coordinateur de l’AMCDD.
Oussama ABAOUSS
Visioconférence
Webinaire sur la gestion de l’exportation et de l’importation des déchets
Jeudi 27 août à 16h, l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD) a organisé une table ronde à distance sous le thème «La gestion des opérations d’exportation et d’importation des déchets solides au Maroc, entre les défis du cadrage juridique, la rentabilité économique, sociale et environnementale et le débat public ». La rencontre a connu la participation d’un groupe de représentants du Département de tutelle, d’acteurs civils et institutionnels, du secteur privé, de quelques spécialistes du domaine et de représentants des entreprises de recyclage des déchets. Selon un communiqué de l’AMCDD, la visioconférence a été consacrée à l’analyse des contenus et des dispositions des deux arrêtés ministériels publiés, récemment, dans le Bulletin Officiel. L’événement s’est articulé autour de plusieurs thématiques, à savoir «Les dispositions juridiques et institutionnelles aux niveaux national et international», «Quelle stratégie nationale et quelle politique publique dans le domaine de l’environnement et du développement durable pour promouvoir le secteur des déchets au Maroc?», «Quels sont les impacts économiques, sociaux et environnementaux pouvant résulter de l’importation des déchets ? ». La rencontre virtuelle a également abordé la question du rôle de la société civile environnementale dans le renforcement des procédures, des mesures et des décisions des pouvoirs publics compétents pour la préservation de l’environnement et la réalisation du développement durable, à travers la gestion des déchets importés.
Jeudi 27 août à 16h, l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD) a organisé une table ronde à distance sous le thème «La gestion des opérations d’exportation et d’importation des déchets solides au Maroc, entre les défis du cadrage juridique, la rentabilité économique, sociale et environnementale et le débat public ». La rencontre a connu la participation d’un groupe de représentants du Département de tutelle, d’acteurs civils et institutionnels, du secteur privé, de quelques spécialistes du domaine et de représentants des entreprises de recyclage des déchets. Selon un communiqué de l’AMCDD, la visioconférence a été consacrée à l’analyse des contenus et des dispositions des deux arrêtés ministériels publiés, récemment, dans le Bulletin Officiel. L’événement s’est articulé autour de plusieurs thématiques, à savoir «Les dispositions juridiques et institutionnelles aux niveaux national et international», «Quelle stratégie nationale et quelle politique publique dans le domaine de l’environnement et du développement durable pour promouvoir le secteur des déchets au Maroc?», «Quels sont les impacts économiques, sociaux et environnementaux pouvant résulter de l’importation des déchets ? ». La rencontre virtuelle a également abordé la question du rôle de la société civile environnementale dans le renforcement des procédures, des mesures et des décisions des pouvoirs publics compétents pour la préservation de l’environnement et la réalisation du développement durable, à travers la gestion des déchets importés.
3 questions à Abderrahim Ksiri, coordinateur de l’AMCDD
Abderrahim Ksiri
« La société civile doit être une partie prenante dans l’élaboration des textes juridiques »
M. Abderrahim Ksiri, coordinateur national de l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD), répond à nos questions sur les causes de la polémique à propos de l’importation des déchets.
- La question d’autoriser l’importation des déchets attise souvent les tensions. Pourquoi ?
- Sur ce sujet, il y a un problème de confiance entre les citoyens et certains acteurs vis-à-vis de l’Etat et des industriels. Ils n’ont pas une confiance réelle et totale que ces déchets seront vraiment des matières non dangereuses qui seront utilisées uniquement pour la production d’énergie. D’autre part, depuis 2016, au lieu d’installer les bases d’une stratégie pour une économie circulaire, de manière globale cohérente et intégrée, le Maroc a continué à sortir des textes qui ont plus abouti à une fragmentation de la législation qui est actuellement obsolète et doit être changée.
- Comment faire pour rétablir la confiance dans ce domaine ?
- La société civile doit être une partie prenante dans l’élaboration des textes juridiques, mais aussi être consultée et habilitée à faire le suivi d’une manière neutre et indépendante pour jouer un rôle d’intermédiation. Cette participation doit cependant être institutionnalisée et continue dans le temps. Il faut également mettre en place un mécanisme digitalisé de transparence, de communication et de suivi qui soit capable de donner confiance à l’ensemble des acteurs et des citoyens.
- Selon vous, est-ce que l’économie circulaire est correctement intégrée dans la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD) ?
- Je crois que la base du nouveau modèle de développement doit être la SNDD qui, par ailleurs, devrait être actualisée pour que l’économie circulaire soit vraiment une partie intégrée et structurante.
M. Abderrahim Ksiri, coordinateur national de l’Alliance Marocaine pour le Climat et le Développement Durable (AMCDD), répond à nos questions sur les causes de la polémique à propos de l’importation des déchets.
- La question d’autoriser l’importation des déchets attise souvent les tensions. Pourquoi ?
- Sur ce sujet, il y a un problème de confiance entre les citoyens et certains acteurs vis-à-vis de l’Etat et des industriels. Ils n’ont pas une confiance réelle et totale que ces déchets seront vraiment des matières non dangereuses qui seront utilisées uniquement pour la production d’énergie. D’autre part, depuis 2016, au lieu d’installer les bases d’une stratégie pour une économie circulaire, de manière globale cohérente et intégrée, le Maroc a continué à sortir des textes qui ont plus abouti à une fragmentation de la législation qui est actuellement obsolète et doit être changée.
- Comment faire pour rétablir la confiance dans ce domaine ?
- La société civile doit être une partie prenante dans l’élaboration des textes juridiques, mais aussi être consultée et habilitée à faire le suivi d’une manière neutre et indépendante pour jouer un rôle d’intermédiation. Cette participation doit cependant être institutionnalisée et continue dans le temps. Il faut également mettre en place un mécanisme digitalisé de transparence, de communication et de suivi qui soit capable de donner confiance à l’ensemble des acteurs et des citoyens.
- Selon vous, est-ce que l’économie circulaire est correctement intégrée dans la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD) ?
- Je crois que la base du nouveau modèle de développement doit être la SNDD qui, par ailleurs, devrait être actualisée pour que l’économie circulaire soit vraiment une partie intégrée et structurante.
Recueillis par O. A.
Repères
Le tollé de 2016
La dernière levée de boucliers concernant l’importation de déchets au Maroc a eu lieu en 2016. Quelque 2500 tonnes de déchets en provenance de Naples, destinés à être utilisés par les cimentiers comme combustible, avaient provoqué un large débat public sur le besoin d’avoir recours à ce genre d’importation et sur les garanties que ces déchets soient réellement non dangereux. Une commission d’enquête parlementaire avait alors été chargée de faire toute la lumière sur cette affaire.
Responsabilité élargie du producteur
La responsabilité élargie du producteur (REP) est un principe prévu dans la réforme de la loi 28.00 relative à la gestion des déchets. Ce principe vise à responsabiliser progressivement le producteur sur le cycle de vie de son produit mis sur le marché. Il vise ainsi à engager le producteur à s’entendre avec des acteurs de son écosystème pour mettre en place un dispositif de collecte en fin de vie et de recyclage. À défaut, le producteur paye une contribution à la collectivité qui mettra en place, elle-même, le dispositif.